Liban : A Beyrouth, "Emmanuel Macron était à l'unisson de la jeunesse libanaise", assure Jack Lang
Le directeur de l'Institut du monde arabe a salué le déplacement rapide d'Emmanuel Macron sur place.
Emmanuel Macron s'est rendu jeudi 6 août au Liban pour assurer le pays du soutien de la France trois jours après les explosions sur le port de Beyrouth. "C'est un déplacement historique", a estimé vendredi 7 août sur Franceinfo Jack Lang, président de l'Institut du monde arabe et ancien ministre de la Culture et de l'Éducation nationale.
Franceinfo : Emmanuel Macron a-t-il eu raison de se rendre au Liban ?
Jack Lang : Oui, absolument oui. C'est un déplacement historique, dans la lignée des déplacements de De Gaulle ou de François Mitterrand à Sarajevo et au Liban.
C'est d’abord le premier chef d'État du monde à se rendre sur place. C’était bien normal : le Liban est une nation sœur, c'est une histoire partagée, des liens affectifs, humains, culturels. Et vous le savez, le Liban est dans le cœur de tous les Français.
Là où s’est rendu Emmanuel Macron sur place à Beyrouth, aucun dirigeant libanais ne s’était rendu en personne, tant la coupure est grande entre le peuple et les dirigeants.
Ce que j'apprécie, c'est la rapidité et l'efficacité de l'aide humanitaire concrète et immédiate. C'est aussi que le président, il l’a dit hier, ait décidé d'agir vite et fort : cette conférence internationale d’aide, le soutien promis de la France.
Cependant, et il a raison sur ce point également, il faut que l’aide qui sera attribuée ne tombe pas dans les poches des corrompus, mais se tourne vers le peuple, ce qui suppose en effet un profond changement du système.
J’entends que l’on parle d’ingérence, ici ou là. Il faut bien comprendre qu’Emmanuel Macron était hier à l’unisson de la jeunesse libanaise, que son souhait ce n’est pas de rétablir un nouveau protectorat français, c’est au contraire de faciliter l’émergence d’un Liban libre, souverain, maître de lui-même.
Par ailleurs, ne l’oublions pas, la France est une puissance méditerranéenne, il n’y a pas de raison de laisser dans cette région la Turquie, l’Iran, la Russie, mener comme elles l’entendent des agressions, des interventions qui le plus souvent créent le désordre et la mort.
Franceinfo : Jack Lang, Avant cette interview, vous avez demandé à ce que soit diffusé une chanson de la diva libanaise Feyrouz. On en écoute un extrait. C’est un chant d’amour pour Beyrouth. Pourquoi nous avez-vous demandé de diffuser cette chanson, Jack Lang ?
Jack Lang : D’abord, je vous le dis franchement, je suis très touché. Et je pense que les Libanais, ainsi que les Français amis du Liban qui nous entendront seront très touchés à l’écoute de cette chanson. Feyrouz est une immense diva, c’est une sublime chanteuse. Elle sera programmée d’ailleurs à l’Institut du Monde Arabe à partir de Janvier dans une exposition sur les Divas du Monde arabe.
Cette chanson touche profondément le cœur. C’est un hommage à Beyrouth ; « Li Beyrouth » veut dire « Pour Beyrouth ». Elle emploie ces mots : « Je salue Beyrouth avec mon cœur ». Je crois qu’en ce moment, il est important que nos cœurs battent, en même temps que le cœur de Feyrouz, et que le cœur des Libanais.
Beyrouth est une ville lumière qui a été meurtrie, blessée, écrasée, par des gangs, des clans qui s'en sont mis plein les poches au lieu de servir le Liban.
L'Institut du monde arabe va présenter plusieurs actions en solidarité avec le peuple libanais. Quelles sont ces initiatives ?
Jack Lang : Nous allons organiser un grand évènement qui s'appellera "24 heures pour le Liban". Par ailleurs, Claude Lemand, un grand galeriste, qui a donné toutes ses œuvres à l'Institut du monde arabe, prévoit sous le nom de "Lumières du Liban" de solliciter les plus grands artistes à composer des œuvres sur la tragédie de Beyrouth comme ils l'avaient fait après la tragédie de Notre Dame.
Dans quelques jours, du 20 au 22 août, une œuvre théâtrale, Yalla Bye chantera aussi l'amour de Beyrouth sur le parvis de l’IMA. Enfin, cette grande exposition "Divas" sera je crois un moment fort de la vie culturelle et intellectuelle.
Il faut bien comprendre qu’aujourd’hui, le Liban, ce sont d'innombrables cinéastes, écrivains, penseurs, peintres, jeunes qui ne demandent qu'une seule chose : vivre, vivre librement, vivre dignement et je suis fier et heureux que mon pays la France, que notre président de la République se soit le premier rendu sur place pour faire entendre cette amitié française.