Bibliothèque numérique : découvrez nos pépites sur la musique arabe
Dans quelques jours la musique, les musiques, vont envahir les rues, les villes et villages pour nous réunir, nous envahir, nous faire rêver. À l’occasion de cette grande fête pouquoi ne pas découvrir les ouvrages consacrés à la musique arabe proposés gratuitement en ligne dans notre bibliothèque numérique ?
On y trouve des études musicologiques sur la musique arabe qui ont marqué le XIXème siècle - notamment le traité sur la musique arabe du baron d'Erlanger (volumes 1 et 2) - des répertoires de musiques et de chansons populaires, un livret d’opéra comique inspiré des Mille et Une Nuits ("Maarouf le Savetier") ou encore un périodique en langue arabe الموسيقى publié par l’Institut royal de musique arabe du Caire dans les années 30.
Parmi les titres proposés, deux études musicologiques de référence permettent d'analyser le regard que portait la musicologie occidentale en contexte colonial sur la musique arabe, et maghrébine en particulier : l'étude de Christianowitsch Esquisse historique de la musique arabe aux temps anciens et celle de son contemporain, F. Salvador-Daniel, La musique arabe : ses rapports avec la musique grecque et le chant grégorien ; deux analyses divergentes pour qualifier/disqualifier la musique arabe.
Alexandre Christianowitsch (1835-1874), est un officier de marine et musicographe russe qui a pour ambition de faire une histoire de la musique arabe ; il part en Algérie entre 1860 ou 1861 pour écrire son ouvrage paru 2 ans plus tard. Il a une conviction : "En reproduisant des extraits du fameux Kitab al-Aghani, le romancero du peuple arabe, je veux rappeler à tous ceux à qui est cher cet art incomparable, le magnifique rôle que la musique jouait autrefois en Arabie. Je désire rappeler sa magnificence passée, pour faire voir plus clairement, plus fortement encore sa misère d'aujourd'hui et sa désespérante pauvreté" (p. 1) Quel jugement !
Contrairement à ce que le titre et ces phrases d'introduction annoncent, l'ouvrage porte uniquement sur la musique en Algérie, en rappelant quelques récits légendaires sur la musique arabe et en proposant des notices biographiques de musiciens (juif, persan, esclave affranchi, chanteuses). La 2ème partie de l'ouvrage est consacrée aux instruments de musique et contient surtout de nombreuses partitions de noubas.
Pour effectuer ce travail, Christianowitsch, qui ne parle pas l'arabe et ne connaît pas l'Algérie, recourt à des intermédiaires pour pénétrer ce monde de la musique algérienne. Imprégné du regard orientaliste, l'auteur magnifie la musique arabe "originelle", celle de l'âge d'or de la civilisation arabe pour mieux dévaloriser et mépriser la musique algérienne qu'il découvre lors de son voyage.
Selon le chercheur Malcolm Théoleyre, auteur d'une thèse sur la musique arabe, "Christianowitsch, place la nouba dans un passé lointain et non européen, renforçant l'altérité de cette musique. Son propos laisse percevoir dans quelle mesure l'ethnographie musicale en développement se nourrit du discours des orientalistes comme une source de légitimité scientifique. » p. 61
« Parmi les éléments de discours empruntés aux orientalistes, les notions de « déclin des civilisations » et « d'inégalité des races » servent à expliquer des phénomènes que les musicographes comprennent mal : en particulier l'absence de l'écrit dans la pratique musicale ou l'origine de la musique algérienne. »
Malcolm Théoleyre « Musique arabe, folklore de France ? » - Thèse IEP de Paris, 2016
A lire En ligne sur TEL Archives ouvertes
- Esquisse historique de la musique arabe aux temps anciens avec dessins d’instruments et 40 mélodies notées et harmonisées par Alexandre Christianowitsch
Cologne : Librairie Dumont-Schauberg, 1863
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Contrairement à Alexandre Christianowitsch, le communard Francisco Salvador-Daniel (1831-1871) connaît l'arabe et le Maghreb. Il débute comme copiste chez un éditeur de musique et entre comme altiste au Théâtre lyrique. Après des études au Conservatoire, il enseigne à Alger de 1853 à 1865. Il est professeur de musique à l'École arabe d’Alger et directeur de l’Orphéon de la ville. Il apprend l’arabe, traduit des chansons d'Afrique du Nord et les adapte pour les instruments occidentaux. Il voyage en Tunisie et jusqu’à Alexandrie, joue avec des musiciens locaux, note la musique berbère, kabyle et arabe. Il écrit La musique arabe (ouvrage qui fait référence en son temps) où il expose ses rapports avec la musique grecque et le chant grégorien et formule cette thèse, originale pour l’époque “que la musique arabe actuelle n'est rien autre chose que le chant des Trouvères et des Ménestrels.”
Source : Berry Blog
- La musique arabe : ses rapports avec la musique grecque et le chant grégorien / par Fco Salvador Daniel.
Alger : A. Jourdan, 1879.
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La bibliothèque vous souhaite une bonne fête de la musique !