Né dans la péninsule Arabique, l’islam est souvent considéré comme intrinsèquement lié au peuple arabe. Pourtant, les Arabes existaient bien avant la naissance de Muhammad. Dans l’Antiquité, ils étaient en majorité polythéistes, mais parfois aussi juifs ou chrétiens, comme au Yémen ou dans la ville de Médine. Le sanctuaire de La Mecque était déjà un centre de pèlerinage important, autour duquel étaient disposées des « idoles » dont il est difficile de définir la nature exacte.
Actuellement, le polythéisme a disparu, ne survivant que dans quelques pratiques superstitieuses. Mais des juifs et des chrétiens vivent toujours dans le monde arabe, même si, depuis quelques décennies, on observe de leur part un mouvement d’exode. Les chrétiens d’Orient, présents en Égypte et au Proche-Orient, se caractérisent par une grande diversité d’Églises : copte, syriaque, arménienne, maronite, chaldéenne… chacune avec de légères différences de dogme.
De nos jours, l’islam est la religion majoritaire du monde arabe, mais les Arabes ne représentent qu’une petite minorité des musulmans dans le monde : à peine 20 % ! Les plus grands pays musulmans en termes de population sont l’Indonésie, le Pakistan et l’Inde. Pourquoi, alors, associer l’islam aux Arabes ? Les raisons sont essentiellement historiques.
En effet, c’est dans l’ouest de la péninsule Arabique qu’émerge, au début du VIIe siècle, une nouvelle religion. Selon la Tradition, Muhammad, marchand de la ville de La Mecque, issu de la tribu qui dirige la ville, commence à prêcher dans les lieux publics. Il a alors une quarantaine d’années. Pratiquant depuis quelque temps des retraites spirituelles, il dit avoir reçu la visite de l’archange Gabriel, qui lui aurait révélé des paroles de Dieu, et l’aurait encouragé à assumer une mission prophétique.
Muhammad regroupe alors progressivement autour de lui une communauté, la oumma. Il appelle ses fidèles des musulmans, littéralement, « ceux qui se soumettent à la volonté de Dieu ». Mais cela bouleverse la vie de la cité ; après une dizaine d’années, Muhammad et ses compagnons sont contraints de quitter La Mecque pour se réfugier dans l’oasis de Yathrib, la future Médine. Cet événement, l’hégire, est fondamental pour toute l’histoire islamique : il marque le début du calendrier musulman, qui correspond à l’année 622 de l’ère chrétienne.
Dès lors, Muhammad agit à la fois comme un leader religieux et un chef politique et militaire. Il organise la communauté et crée un proto-État, en élaborant la « constitution de Médine », un ensemble de textes difficiles à dater précisément. Il mène également les combattants musulmans dans des raids contre la tribu qui dirige La Mecque, jusqu’à prendre la ville en 630. Il étend aussi son influence sur une grande partie de la péninsule Arabique, avant de mourir en 632.
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Quelques décennies après sa mort, la communauté des musulmans se déchire sur la question des personnes légitimes à prendre la succession du Prophète, les califes, littéralement ses « successeurs ». Sur les quatre premiers, trois sont assassinés. La division se fait plus forte autour de du quatrième calife, Ali, gendre et cousin du Prophète. Deux clans s’opposent dans une guerre civile : ceux qui prennent le parti (shia) de Ali, les futurs shiites et kharijites, et ceux qui promeuvent un proche du troisième calife, les sunnites. Ce sont finalement ces derniers qui prennent le pouvoir, et demeurent largement majoritaires parmi les musulmans jusqu’à nos jours.
Si la division entre ces trois grands courants de l’islam a une origine politique, des considérations religieuses s’y ajoutent progressivement. Les shiites donnent une grande importance aux descendants du Prophète et de Ali, les imams, considérés comme les seuls successeurs légitimes car seuls capables de décrypter le sens caché du Coran. Ces personnages historiques sont à l’origine de nombreuses prescriptions religieuses. Le dernier imam, disparu lors de « l’occultation », doit revenir à la fin des temps. Selon les branches du shiisme, il peut s’agir du cinquième, du septième ou du douzième de la lignée.
Chez les sunnites, le terme imam désigne simplement la personne qui dirige la prière à la mosquée, vénérable par son âge ou par son savoir. La dimension ésotérique du Coran y est beaucoup moins présente que dans le shiisme. Les sunnites s’attachent davantage à la lettre du texte révélé, et à plusieurs principes fondamentaux : Dieu est unique et tout-puissant, il existe une prédétermination dans chaque acte humain et le musulman doit éviter à tout prix la fitna, la dissension.
D’après les traditions musulmanes, le Prophète a reçu des révélations jusqu’à la fin de sa vie, révélations qui, transcrites, forment le Coran. Ses 114 sourates, ou chapitres, reprennent les paroles divines reçues par Muhammad à La Mecque et à Médine. Elles ne suivent pas un ordre chronologique, mais sont classées, approximativement, des plus longues aux plus courtes. Les plus anciennes, souvent constituées de quelques versets seulement, se retrouvent donc à la fin du livre.
La langue arabe est fondamentale dans l’islam, car le Coran a été révélé dans cet idiome, comme le mentionne le texte à plusieurs reprises : « C’est une Révélation en langue arabe claire » (Coran, sourate 26, verset 195). Cela confère à la langue son caractère sacré ; les musulmans considèrent d’ailleurs qu’il n’est pas possible de traduire le Coran sans en altérer le sens. Le texte est empreint d’une certaine musicalité, d’un rythme qui a des parallèles dans la poésie arabe.
En plus du Coran, un autre ensemble de textes est respecté par les musulmans : les hadiths, ou traditions, regroupés dans la Sunna. Il s’agit des différentes paroles et gestes attribués au Prophète durant son existence, rapportés par ses proches. Sans avoir le même caractère sacré que le Coran, les hadiths ont valeur d’exemple. Il en existe différents recueils, correspondant aux différents courants de l’islam. Pour le sunnisme, les plus importants sont ceux recensés par al-Boukhari et Mouslim. Ces deux savants ont recueilli ces paroles et gestes plus de deux siècles après la mort du Prophète ; même s’ils portent une grande attention à la valeur de la « chaîne de transmission », isnad (« Un tel a rapporté qu’un tel avait vu que le Prophète avait fait… »), leur sélection est marquée par les enjeux de leur époque, différents de ceux des premiers temps de l’islam.
Coran et hadiths ont une fonction religieuse, mais également juridique et sociale. En effet, dans le monde islamique, les juristes s’appuient sur ces deux sources pour dire le droit, le fiqh. Ce faisant, ils essayent de s’approcher au plus près de la Loi divine, la sharia. Le droit musulman recouvre tous les domaines de la vie des croyants : la religion à proprement parler, mais aussi les relations sociales, la vie quotidienne, le système politique. Lorsque le Coran et la sunna ne sont pas suffisamment clairs pour statuer sur un cas, les juristes sunnites en appellent à deux autres principes : les consensus déjà établis et le principe d’analogie, défini par al-Shafii. Par exemple, si le vin est condamné car il est cause d’ébriété, toute boisson alcoolisée doit être considérée de la même manière.
Les juristes et les juges, les cadi, ne sont pas toujours d’accord sur la place à donner à chaque source du droit. D’où l’existence de plusieurs « écoles juridiques », les madhhabs, qui représentent autant de voies différentes d’interpréter le Coran et les hadiths.
Chez les Sunnites, les quatre principales sont le hanafisme, le malikisme, le shafiisme et le hanbalisme. Mais il a existé ou il existe encore d’autres tendances : le mutazilisme, ou rationalisme, ou encore le wahhabisme, très rigoriste.
Enfin, il faut signaler l’existence d’une riche tradition mystique, née dans les premiers siècles de l’islam : le soufisme. Ce mot, qui fait peut-être référence à la robe de laine simple (souf) portée par les adeptes, désigne un ensemble de pratiques qui toutes visent à établir un lien direct entre le croyant et Dieu, en dehors de toute science religieuse. Les adeptes pratiquent généralement l’ascétisme et la méditation, mais peuvent aussi trouver dans la musique et la danse une voie vers Dieu. Ils vivent souvent en confréries, la relation à un maître spirituel étant fondamentale.
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