Portraits
Publié le
par
Chloé Ghobril

La maitrise de l’arabe pour les chercheurs arabisants

Entretien avec Abdul-Hameed Al-Kayyali

Entretien avec Abdul-Hameed Al-Kayyali, coordinateur pédagogique des sessions et des cours de langue arabe à l’Institut français du Proche-Orient, l’Ifpo, à Amman et à Beyrouth. Il sera l’un des conférenciers d’EDIMA, l’Ecole d’automne du Centre de langue de l’IMA dédiée à la didactique de la langue arabe qui se tiendra du 23 au 27 octobre 2023.

De 2014 à 2022, Abdul-Hameed enseigne, en arabe, différentes matières aux non-natifs arabisants : l’histoire, la culture, la civilisation et le journalisme.
D’ailleurs, il faut souligner qu’il est tout d’abord chercheur. En plus d’être coordinateur pédagogique, il est aussi chercheur associé et historien au département des études arabes médiévales et modernes de l’Ifpo. Abdul-Hameed est titulaire d’un doctorat de l’Institut de recherches et d’études sur les mondes arabes et musulmans (IREMAM) de l’Université d’Aix-Marseille en France et a déjà publié nombreuses recherches et études en français, en anglais et en arabe.
Tout au long de sa carrière de chercheur, il s’est concentré sur les domaines de l’histoire islamique primitive, l’histoire culturelle de l’islam et l’histoire contemporaine et la politique du Moyen-Orient.

Bien connaître la langue [arabe] évitera aux chercheurs d’avoir recours à des supports secondaires rédigés en langues européennes et pouvant donner un contenu partiel, manquant ou non-précis.

Vous dirigez le programme d’enseignement de langue arabe aux non-natifs à l’Institut français du Proche-Orient. Vous avez comme spécialisation les sciences humaines et sociales et non pas la langue arabe. Qu’est-ce que vous a apporté cette expérience ? La maitrise de la langue est-elle importante pour les chercheurs arabisants ?

Pour commencer, permettez-moi de préciser que dans le cadre et le contexte de l’enseignement de la langue arabe aux non-natifs, et dans le contexte de l’enseignement des langues en général, il n’y a aucune séparation entre éléments linguistiques et éléments culturels ou en d’autres termes, entre langue et contenu. Si jamais nous trouvons une séparation entre ces deux éléments, il est certain qu’elle sera forcée et artificielle.

Cette relation organique, évidente et naturelle présente entre langue et contenu culturel dans toutes ses dimensions historique, politique, philosophique… a pu me guider et me montrer la place que j’occupais en tant qu’enseignant et chercheur. J’ai compris pourquoi je pouvais me lancer, il y a dix ans de cela, dans l’enseignement de la langue arabe aux chercheurs non-natifs.

Cette expérience dans le domaine de l’enseignement a énormément enrichi le chercheur en moi, formé aux sciences humaines et sociales. L’enseignement étoffe toujours l’expérience du chercheur puisqu’il implique débats, questionnement et renouveau. Il ne faut pas non plus oublier le lien entre recherche linguistique et histoire, ou encore le rôle que jouent la langue et l’histoire dans les questions identitaires. Tous ces croisements ne font qu’éclairer les recherches.

A la lumière de cette relation organique entre langue et culture se révèle aussi l’importance de la maitrise de la langue arabe pour les chercheurs arabisants. Sans cette maitrise, ils ne pourront comprendre ni la culture arabe dans sa globalité, ni leur propre domaine de recherche. Ils ne pourront pas non plus baser leurs démarches et leurs études sur les supports en arabe classique ou moderne et ne pourront pas bien les comprendre. Bien connaître la langue évitera aux chercheurs d’avoir recours à des supports secondaires rédigés en langues européennes et pouvant donner un contenu partiel, manquant ou non-précis.

Notre besoin le plus pressant est un cadre de référencement qui soit propre à la langue arabe destinée à être apprise aux non-natifs, surtout au niveau de la conception des examens, des barèmes et des méthodes d’enseignement, à l’image du Cadre européen de référencement.

Quelle est la particularité des méthodes d’enseignement de la langue arabe par rapport aux méthodes d’enseignement des autres langues ?

Il y a des méthodes d’enseignement communes entre toutes les langues qui permettent à toutes ces langues de profiter l’une de l’autre.

L’importance du sujet des méthodes s’accroît suite à la réalisation que l’enseignement de l’arabe aux non-natifs n’est ni assez valorisé ni bien exécuté, surtout si nous le comparons à l’enseignement de l’anglais ou du français aux non-natifs qui incluent des méthodes riches, des cursus variés, des supports ouverts à tous en plus de modalités d’évaluation conformes au Cadre européen de référencement. L’enseignement de la langue arabe aux non-natifs est lui dépourvu d’une grande partie ou même de la plupart de ces éléments.

A partir de toutes ces idées, je vois la priorité de nous concentrer sur tous les points communs entre l’enseignement de la langue arabe et l’enseignement d’autres langues afin d’ouvrir de nouveaux horizons et davantage de possibilités de profiter de ces points communs pour enrichir les méthodes d’enseignement de la langue arabe.

En ce qui concerne la particularité de nos méthodes, je trouve qu’elles sont reliées aux particularités de la langue arabe. Une particularité de la langue est bien évidemment la relation entre l’arabe littéral et les différents dialectes, la « prolongation linguistique » dans laquelle le monde arabe baigne, ainsi que la différence entre la langue parlée et la langue écrite. Nous pouvons ajouter à tout cela la difficulté que peuvent présenter ces particularités à n’importe quel apprenant non-natif et le grand défi qu’elle créent dans l’enseignement au niveau de la prononciation, de la grammaire ou du vocabulaire qui varient entre arabe classique, moderne et dialectal.

Que manque-t-il, à votre avis, pour bien former les enseignants d’arabe aux non-natifs ?

Je continue en me basant sur ma réponse à la question précédente. Notre besoin le plus pressant est un cadre de référencement qui soit propre à la langue arabe destinée à être apprise aux non-natifs, surtout au niveau de la conception des examens, des barèmes et des méthodes d’enseignement, à l’image du Cadre européen de référencement.

Ce qui manque aussi est la formation continue et les encadrements de mises en commun qui peuvent favoriser les échanges d’expertise et d’expérience dans le domaine de l’enseignement.

Pouvez-vous percevoir l’enthousiasme des apprenants arabisants ?

Nous remarquons, à travers nos sessions à Amman et à Beyrouth, l’enthousiasme des étudiants et des stagiaires en France qui, par pure volonté, étudient la langue arabe et s’immergent même dans le monde arabe non seulement pour apprendre la langue mais aussi pour avoir une notion réelle et un contact direct avec la culture régionale et comprendre sa réalité géopolitique et sociologique.

Qu’est-ce qui vous a encouragé à accepter notre invitation et à participer à l’Ecole d’automne du Centre de langue de l’IMA ?

La raison principale pour laquelle j’ai accepté de participer à cette école d’automne est la nécessité d’avoir une certaine plateforme, un événement récurrent, qui puisse réunir les acteurs de la langue arabe et surtout de l’enseignement de cette langue pour qu’ils aient la chance de discuter des différents aspects de ce domaine, des problématiques auxquelles ils font face, de leurs besoins, …

Ils pourront aussi faire maints échanges et partager leur expertise afin d’arriver au perfectionnement et au renforcement du niveau de l’enseignement de la langue arabe aux non-natifs.

في أهمية أن يتقن الباحثون المستعربون اللّغة

سيشارك عبد الحميد الكيّالي في المدرسة الخريفيّة لتعليم اللّغة العربيّة الّتي ينظّمها مركز اللّغة والحضارة العربية لمعهد العالم العربي بين 23 أكتوبر و27 تشرين الأوّل 2023.

عبد الحميد الكيّالي هو حالياً المسؤول التّعليمي لدورات اللغة العربية في المعهد الفرنسي للشرق الأدنى- إفبو في عمّان وبيروت. عمل مدرساً لمواد تاريخ الفكر والثقافة والحضارة والصحافة لدارسي اللغة العربية كلغة أجنبية بين عامي 2014 و2022. وهو الأصل باحث في مجال التاريخ في قسم الدراسات العربية الوسيطة الحديثة في المعهد الفرنسي لدراسات الشرق الأدنى " إفبو" وله العديد من الأبحاث والدراسات المنشورة بالفرنسية والإنجليزية والعربية. نال عبد الحميد شهادة دكتوراه من معهد الدراسات حول العالم العربي والإسلامي في جامعة أكس-مارسيليا في فرنسا.  ركز طوال مساره البحثي على مجالات التاريخ الإسلامي المبكر، والتاريخ الثقافي للإسلام، والتاريخ والسياسة المعاصرين في الشرق الأوسط.

أحببنا أن نجري معه هذه المقابلة لنضيء على هذا الجانب الذي يمزج فيه حياة الباحث بحياة مدرس اللغة العربية لباحثين مستعربين غير ناطقين به ويطور المضامين التي يقترحها مع فريقه في إطار برنامج تدريس العربية، حيث إن الباحثين غالباً ما لا يكترثون بالجانب التدريسي للغة وأقل من ذلك بطرائق تدريس اللغة.

أنت تدير برنامج تدريس العربية للناطقين بغيرها في المعهد الفرنسي للدّراسات في الشّرق الأدنى، واختصاصك الأساسي في العلوم الإنسانية والاجتماعية وليس اللّغة العربية، ما الذي أضافته هذه الخبرة لك، وما أهمية إتقان اللّغة العربية للباحثين المستعربين؟

اسمحوا لي في البداية أن أوضح بأنه في سياق تدريس العربية كلغة أجنبية، وبل في سياق تدريس اللغات عموماً، لا يوجد فصل بين ما هو لغوي أو ثقافي أو بين ما هو لغة أو مضمون. وإن كان هناك فصل فهو اعتباطي ومصطنع. في ظلّ هذه العلاقة العضوية بين اللغة ومحتواها الثقافي في كل أبعاده؛ التاريخي والفكري والسياسي.. فإنني قد وجدت مكاني كمدرس وباحث في الوقت نفسه عند انخراطي في تدريس العربية كلغة أجنبية قبل عشر سنوات من الآن. هذه الخبرة التدريسية أضافت لي الكثير كباحث في مجال العلوم الإنسانية والاجتماعية، فالتدريس عموماً يغني تجربة الباحث بما يتضمنه من حوار ونقاش وتجديد، علاوة على الصلة بين أبحاث اللغة والتاريخ؛ ومن ضمنها مثلاً صلة اللغة بمبحث الهوية وصلة التاريخ بالمبحث نفسه، وما يمكن أن يشكله هذا التقاطع من إثراء للباحث. 

في ضوء العلاقة العضوية ذاتها بين ما هو لغوي وثقافي تتكشّف أهمية إتقان الباحثين المستعربين للغة العربية؛ إذ دون إتقانها لن يمكنهم استيعاب الثقافة العربية عموماً، ومجالات تخصصهم تحديداً، فضلاً عن التعامل مع المصادر العربية الكلاسيكية أو الحديثة وفهمها على نحو صحيح بدل الاعتماد على مصادر ثانوية بلغات أوروبية يمكن لها أن تحمل تحليلاً منمّطاً أو جزئياً أو غير دقيق.

أكثر ما ينقص لتأهيل معلمي اللغة العربية عدم توفر إطار مرجعي خاص بتدريس اللغة العربية كلغة أجنبية يتضمن مستويات المتعلمين بما يتناسب مع خصائص العربية وتوصيف الامتحانات وجداول التصحيح وطرائق التدريس

ما هي خصوصية طرائق تدريس العربية بالنّسبة لغيرها من اللّغات؟

في البداية هناك طرائق تدريس مشتركة بين كل اللغات، وهو ما يمكّنها -أي اللغات- الاستفادة من بعضها البعض. وتزداد أهمية هذه المسألة في ضوء أنّ تدريس العربية كلغة أجنبية ليس مخدوماً بالشكل المطلوب إذا ما تمّت مقارنته بتدريس الإنجليزية أو الفرنسية كلغات أجنبية؛ حيث يوجد لدى هذه اللغات طرائق تدريس غنية، ومناهج وافرة، ومصادر تدريس مفتوحة، فضلاً عن توفّر إطار مرجعي لتعليم هذه اللغات كلغات أجنبية. أما في مجال تدريس اللغة العربية كلغة أجنبية، فإننا نفتقد إلى كل ذلك تقريباً.

من هنا، فإنني أرى أولوية التركيز على ما هو مشترك في طرائق تدريس العربية مع غيرها من اللغات لنفتح المجال واسعاً أمام الاستفادة من هذه المشتركات لإثراء طرائق تدريس العربية.

أمّا فيما يتعلق بخصوصية طرائق تدريس اللغة العربية، فهي مرتبطة بخصوصيات العربية نفسها، مثل العلاقة بين العامية أو العاميات والفصحى و"الامتداد اللغوي" الذي تعيشه العربية بين المحكي (العامية) والمكتوب أو المقروء (الفصحى). يُضاف إلى ذلك درجة صعوبة العربية لأيّ متعلم أوروبي، وهو ما يفرض تحدياً أكبر في طرائق التدريس، سواءً لناحية النطق أو القواعد أو تعدّد مجالات المفردات بين عربية حديثة أو كلاسيكية أو عامية.

ما الذي ينقص في رأيك بالنّسبة لتأهيل مدرسي العربية بالنّسبة للنّاطقين بغيرها؟

عطفاً على ما تمّ تناوله في الإجابة على السؤال السابق. فإن أكثر ما ينقص لتأهيل معلمي اللغة العربية عدم توفر إطار مرجعي خاص بتدريس اللغة العربية كلغة أجنبية يتضمن مستويات المتعلمين بما يتناسب مع خصائص العربية وتوصيف الامتحانات وجداول التصحيح وطرائق التدريس... إلخ على شاكلة الإطار الأوروبي المرجعي للغات. وربما ما ينقصهم أيضاً توفير التدريب المستمر ووجود أطر تنسيقية تفتح المجال أمام تبادل الخبرات والارتقاء بهذا الحقل التدريسي.

هل ترى قبولاً لتعلّم اللّغة العربيّة في فرنسا؟

نلحظ من دوراتنا في كلّ من عمان وبيروت إقبالاً من الطلاب والمتدربين في فرنسا على دراسة اللغة العربية، بل وأبعد من ذلك القدوم إلى المنطقة ليس فقط لتعلم اللغة العربية، وإنما أيضاً لتعميق فهم المنطقة بالتماس المباشر مع ثقافتها وواقعها الجيوسياسي والاجتماعي. 

ما الّذي دفعك إلى قبول الدّعوة والمشاركة في المدرسة الخريفيّة؟

فكرة أساسية دفعتني إلى قبول المشاركة في المدرسة وهي ضرورة وجود منصة تجمع المختصين في مجال تدريس العربية تهيئ لهم الفرصة ليتناقشوا في شؤون هذا الحقل التدريسي، وإشكالاته، واحتياجاته… وكذلك لتبادل الخبرات فيما بينهم وصولاً إلى الارتقاء بمستوى تدريس العربية كلغة أجنبية. 

Autres Portraits

Interview with Nizar Habash

مقابلة مع حنان خليفة