L’insurrection algérienne et La Commune de Paris : deux insurrections en miroir
Cette année la France commémore le 150ème anniversaire de la Commune de Paris. Pendant quelques semaines, du 18 mars au 28 mai 1871, les Parisiens se sont battus pour instaurer une « République sociale et universelle » qui sera réprimée dans le sang. C’est aussi l’occasion de rappeler un autre anniversaire, celui de l’insurrection qui, à partir du 16 mars 1871, a soulevé des milliers d’Algériens contre l’occupation française : une révolte qui, selon l’historien Mouloud Gaid, “a marqué une étape décisive, comme un relais essentiel entre la lutte d’Abdelkader et le mouvement national du XXè siècle”.
Menées par le notable Mohammed al-Mokrani, et appuyées par la confrérie Rahmaniya, des centaines de tribus vont se soulever contre les colons et l’armée. La répression sera terrible pour les populations algériennes : exécutions, expropriations des terres, déportations vers la Nouvelle Calédonie où les Algériens insoumis retrouveront les Communards déportés. De cette rencontre naitront des liens militants qui pousseront notamment Louise Michel à faire une tournée de conférences en Algérie en 1904.
Nous profitons de cet anniversaire pour vous proposer une sélection de ressources pour en savoir plus sur tous ces sujets :
Des Arabes à Paris soutiennent la Commune
Si de nombreuses études ont documenté la participation et le soutien d’étrangers européens à l’insurrection et aux combats des Parisiens contre les Versaillais, la présence de combattants ou de personnalités arabes est moins connue et mériterait d’être approfondie.
Toutefois quelques sources mentionnent le ralliement de soldats issus des troupes coloniales à la Garde nationale :
“La Commune a aussi annoncé la reformation du corps des Zouaves de la République, qui iront se battre aux côtés des insurgés. Créés en 1830 après la conquête de l’Algérie, les quatre régiments de Zouaves avaient été dissous après la défaite de Sedan."
Parmi les étrangers arabes qui ont soutenu la Commune Anys al-Bitar, un syro-libanais, est mentionné dans une brève notice du Maitron. Proche des communards il travaille quelque temps à la Bibliothèque nationale au service des manuscrits arabes.
À la demande d’Élie Reclus nommé directeur de la Bibliothèque Nationale par la Commune de Paris, Anys-el-Bittar fut chargé de travaux spéciaux à la section des manuscrits (langues arabe et syriaque) de la Bibliothèque Nationale (J.O. Commune 13 mai 1871). Le 17, le gouvernement de Versailles désignait pour les mêmes fonctions Léopold Delisle que Reclus avait révoqué. »
À propos de l’insurrection algérienne de 1871
« Le soulèvement de 1870...procède d'une somme de mécontentements perceptibles dès avant la guerre franco-prussienne. Les uns concernent l'aristocratie guerrière qui voit son influence segmentée et ses pouvoirs diminués par les autorités françaises. Tel est le cas de Mohammed el-Mokrani...les autres agitent les masses musulmanes inquiètes de l'avènement d'un régime civil...qui signifie la domination accrue des colons... »
Bernard Droz, article Insurrection de 1871: la révolte de Mokrani, dans L'Algérie et la France, dictionnaire coordonné par Jeannine Verdès-Leroux, R. Laffont 2009, p.474.
En ligne :
- une explication de l’évènement par l’historien et éditorialiste Slimane Zeghidour sur TV5 monde - mise en ligne le 16 mars 2021
- Mars 1871, l’insurrection algérienne d’El Mokrani : article de Rosa Moussaoui paru dans le journal L’Humanité, le 12 Mars 2021
- 16 mars 1871 la révolte algérienne - article publié le 15mars 2021 sur le site des Amies et amis de la Commune de Paris 1871
Livres
Après l’insurrection : les déportés algériens en Nouvelle Calédonie
Des liens se nouent entre Communards et Algériens, Kabyles pour la plupart, déportés en Nouvelle-Calédonie : on a déjà mentionné Louise Michel qui fera une tournée de conférences en 1904 en Algérie.
Mais le cours de l’histoire n’est pas un long fleuve tranquille : certains communards amnistiés dans les années qui suivent l’insurrection de 1871 retourneront en Algérie pour s’installer comme colons, tandis qu’en Nouvelle-Calédonie des Algériens déportés participeront, au côté de la France, à la répression de l’insurrection des Kanaks en 1878...