Il fut, à partir de 1994, la star incontestée du mezwad (du nom d’une cornemuse), genre sulfureux, voisin du raï, aux thèmes à dominante crument sociale et à la rythmique fougueuse. Ses concerts, sous forme de shows bien réglés, attiraient des milliers de spectateurs. En 2001, au grand dam de ses nombreux fans, il décide d’arrêter sa carrière et de se tourner vers une vie pieuse. Certains lui reprocheront cet attrait soudain pour la chose religieuse et une rumeur prétend même qu’il voulait faire effacer tout ce qui relevait de son ancienne discographie.
Fawzi Ben Gamra s’en défend et revendique un islam de la tolérance : « Pendant huit ans, j’ai pratiqué la méditation et surtout profité de ma famille et mes enfants, que je voyais très peu auparavant, en raison de tournées interminables. Je n’ai jamais interdit la vente de mes albums du passé et je suis quelqu’un qui adore écouter toutes les musiques, regarder un match de foot et rigoler avec mes amis. J’ai toujours refusé la logique du halal et du haram ».
En 2009, Fawzi effectue son retour vers la chanson à travers Joyaux de la chanson sacrée, un opus renfermant des chants de louange à Allah et à son prophète, rappelant à la fois une vieille tradition liturgique tunisienne et un style mystique proche de celui de la confrérie Soulamiya. Il reprend son bâton de pèlerin pour parcourir la Tunisie et de nombreux pays européens, où il donne interviews et concerts. Il est également à l’affiche de nombreuses représentations dédiées à l’art soufi, le tout en s’investissant dans des actions humanitaires.
Ben Gamra a certes changé de registre, mais la voix reste magnifique et ses chants, finement arrangés, ne dérogent pas à la règle moderniste de ses débuts, comme le confirment ses deux derniers albums à succès, parus en 2010 et en 2013.