Terminé
02 octobre04 octobre 2003

La Pluie

La pièce de Rachid Boudjedra paraît initialement en arabe sous le titre de Journal d’une femme insomniaque ; le " je " de La Pluie est donc celui d’une femme. Médecin, célibataire et insomniaque depuis l’âge de la puberté, elle consigne avec fébrilité et douleur ses interrogations, ses angoisses et ses révoltes dans un journal qui se déploie sur six nuits. Unité de temps – lourd et visqueux – où se mêlent les saisons et les âges, unité de lieu dans cette chambre de la maison familiale où s’écrivent ces mots de résistance.
Dans son adaptation, Antoine Caubet a choisi de mettre en scène un homme ; il lui a donné pour consigne d’arracher les mots au texte de Rachid Boudjedra et de retrouver ainsi la force prométhéenne et créatrice de l’écriture. Mot à mot, le comédien façonne un visage, un corps, une mémoire, une pensée, des sensations qui sont celles de la femme du journal. Puis, sans effort, essaie sur lui-même les mots de sa créature sibylline. Peu à peu, les mots le transforment et lui révèlent de lui-même ce qui lui était invisible jusqu’alors.
Une comédienne apparaît alors sur le plateau. Femme créée par le théâtre, double de celle de l’écriture. Ombre et silhouette, elle symbolise la conscience trouble de Rachid Boudjedra, son démiurge.

Adaptation, mise en scène et lumières : Antoine Caubet
Scénographie : Boukhari Habbel
Assistant mise en scène : Samir Meftah
Interprètes : Hamid Remas et Malika Belbey
Technique : Abdelghani Mazouz (lumières), Madjid Mansouri (son)

Rachid Boudjedra
Puisant aux sources de la philosophie et d’une poésie " pour ne plus rêver " (titre d’un premier opus), l’auteur donne voix à ses désirs impétueux de révolte et récuse les réalités du monde. Il a vingt-huit ans en 1969 quand paraît La Répudiation, brûlot inclassable, critique acerbe des hypocrisies et des répressions de tous ordres, que les initiés dévorent. Le livre consacre sur le champ l’auteur pour son écriture surprenante de réalisme et de lyrisme. Publiée en 1985 en langue arabe, puis en 1987 dans sa version française, La Pluie approfondit les obsessions de Boudjedra, déjà lisibles dans La Répudiation : prégnance d’une sexualité indéchiffrable, univers glauque des rapports familiaux et portraits divers. Chacun de ces éléments se relayant pour aiguiser la pression des désirs, des malentendus et des malheurs quotidiens.