La mélodie de la palmeraie
Avec Brahim Belkheir, Tarzagh et Othman Othmani (Djanet)
Comme Badi Lalla de Tamanrasset, Brahim Belkheir, aujourd’hui à la retraite, possède une connaissance précise de la culture de la région du Tassili, célèbre pour ses gravures rupestres. Natif d’Iherir, un véritable Eden niché au cœur d’immenses montagnes et d’espaces caillouteux, Brahim, a longtemps été guide dans le parc national du Tassili. Lorsque la nuit s’installe, cet homme à la mémoire prodigieuse, entouré par des joueuses de tindé (percussion typique), souvent survoltées, se transforme en maître de cérémonie. Sa voix, tour à tour enjôleuse et vigoureuse, transporte l’auditeur de Bordj El Haoues (ex-Fort Gardel) ou de Djanet, vers d’autres univers, tout aussi enchanteurs. D’autant que la musique de Brahim va au-delà du patrimoine local et fraternise avec d’autres styles, du Sud comme du Nord algériens.
Changement de registre avec Tarzagh, probablement l’une des dernières joueuses d’imzad (vièle monocorde), qui développe un répertoire portant le nom de son instrument. Ce dernier se présente sous forme d’une demi-calebasse recouverte d’une peau tendue sur laquelle sont pratiquées deux ouïes. Un manche qui ressemble à un arc flexible la traverse de part en part, apparaissant sur la moitié de sa longueur environ. La corde, une mèche en crins de cheval, est frottée par un archet en bois très courbé. L’imzad, malgré les effets de la sédentarisation et de l’urbanisation, rythme encore la vie musicale traditionnelle touarègue et symbolise une de ses valeurs culturelles les plus importantes.
L’instrument est d’époque indéterminée, les musiciennes disent qu’il existe depuis aussi longtemps que leurs ancêtres Imazighen. Et d’ajouter qu’il donne du courage aux hommes. Parmi les anciennes, celles qui, à l’image de Tarzagh, continuent d’en jouer, n’ont pu retenir qu’une douzaine de modes, sur plus de trente.
L’imzad associe un morceau de musique à chaque mouvement du cœur, de l’esprit, de la vie, à chaque élément du Tassili. A l’ayis (le cheval), aux iloujen (les chameaux) ou à wanda tamut (l’aube). Avec Othman Othmani, poète et chanteur, Tarzagh a trouvé le partenaire idéal pour faire vibrer des mots simples et émouvants, sans s’interdire quelques moments d’allégresse.