Terminé
26 janvier 2023

Syrie : Le Pays brûlé / A quoi bon encore le monde?

Présentation d'ouvrage - Dans le cadre des Jeudis de l'IMA

Catherine Coquio, Joël Hubrecht et Najah Albukai présenteront Syrie : Le Pays brûlé. Le livre noir des Assad 1970-2021 (Seuil, 2022), un livre qui redonne une voix à celles et ceux que la dictature de Hafez puis Bachar al-Assad s’est employé, et s’emploie toujours, à faire taire en Syrie et ailleurs.

Catherine Coquio présentera également son recueil d'essais A quoi bon encore le monde? La Syrie et nous (Actes Sud 2022), un livre qui pose des questions anti-nihilistes à un monde défait.

La rencontre sera animée par Madjid Zerrouky.

Syrie, le pays brûlé (1970-2021)
Le livre noir des Assad

Ce livre redonne une voix à celles et ceux que la dictature de Hafez puis Bachar al-Assad s’est employé, et s’emploie toujours, à faire taire en Syrie et ailleurs. Il documente et dénonce des crimes que beaucoup voudraient oublier malgré leurs liens directs avec nos propres hantises (crise de l'accueil migratoire, crispation identitaire, attentats djihadistes, invasion russe de l’Ukraine…). Dans la lignée des grands Livres noirs, il retrace précisément les faits : terreur, emprisonnements massifs, tortures systématiques, sièges des villes, bombardements chimiques, exterminations ethnico-confessionnelles, « assainissement » démographique, dont il éclaire les ressorts historiques, géopolitiques et sociaux. La révolution et la contre-révolution en Syrie nous révèlent certains fondamentaux de notre temps : à la fois la puissante aspiration à la liberté des sociétés longtemps brimées, la radicalisation sans retenue de toutes sortes de régimes autoritaires et l’affaissement des idéaux démocratiques dans les pays occidentaux. Au travers de témoignages, sous forme de récits, de textes littéraires, de photographies et de dessins, éclairés par les analyses des spécialistes des conflits du Proche-Orient ou des violences de masse, cet ouvrage d’une ampleur inédite, fait donc œuvre de mémoire, d’histoire et d’avertissement. Contre le négationnisme, la banalisation, l’indifférence ou le silence. Et contre l'impunité de ceux qui, en exécutant leur mot d’ordre « Assad ou on brûle le pays », ont mis la Syrie à feu et à sang.

À quoi bon encore le monde ? La Syrie et nous

Ce qui se passe en Syrie depuis le soulèvement de 2011 est d’une telle démesure qu’assimiler cette réalité de cauchemar semble à présent impossible. Inévitable est la tentation de la faire tomber dans les oubliettes de l’histoire où semble à présent la précipiter une autre guerre avec sa cohorte d’atrocités. Or ce seul enchaînement Syrie-Ukraine montre que ce qui s’est passé en Syrie ne concerne pas seulement les Syriens : la politique d’anéantissement de Bachar al-Assad touche à un illimité qui a atteint notre monde et devrait le réveiller dans ses ressorts vitaux.
La question du monde entête les Syriens, qui ont porté cette histoire. Elle les hante sous forme à la fois d’une colère radicale et d’une attente tout aussi radicale. De quelle croyance au monde nous parle le désespoir des Syriens ? Que signifie leur mal de monde ? Quel rôle y jouent la littérature et l’art ? Ce livre pose des questions anti-nihilistes à un monde défait en lisant un choix d’œuvres où se laissent reconnaître certains actes : acte de témoigner, d’écrire, d’échanger, de penser ; acte d’imaginer, de résister. Leur force vit d’une poétique singulière où, dans la figure d’un monde fracassé, s’entrevoit l’irrésistible naissance d’un autre. Leurs auteurs s’appellent Samira al-Khalil, Yassin al- Haj Saleh, Khaled Khalifa, Samar Yazbek, Faraj Bayrakdar, Moustafa Khalifé. Chacun s’y affronte à un monstre ici nommé nihilisme. Chacun traverse un désert. “Le monde, disait Hannah Arendt, est toujours un désert qui a besoin de ceux qui commencent pour pouvoir à nouveau être recommencé.” Les Syriens sont aujourd’hui “ceux qui commencent”. À partir du désert.

D.R.

Intervenants :

Catherine Coquio est professeure de littérature comparée à Université Paris Cité (P7), membres de l'équipe Cerilac, "Ecrire et penser avec l'histoire". Elle a travaillé sur les mutations esthétiques, politiques et critiques du nihilisme et de l'utopisme aux 19-20-21e siècle, sur la violence politique et les formes d'écriture de l'histoire, les littératures de témoignage, les cultures de la mémoire et la transmission critique. Elle a créé en 2011 la collection "Littérature Histoire Politique" qui a accueilli en 2019 "Ecrits libres de Syrie édités par Franck Mermier. Elle a contribué à la création du Comité Syrie-Europe en 2017, organisé le colloque international "Syrie : à la recherche d'un monde", avec Nisrine al Zahre et Halla Alabdalla (Paris 7, déc 2017).

Elle a coordonné avec Joël Hubrecht, Farouk Mardam Bey, Naîla Mansour : Syrie : Le Pays brûlé. Le livre noir des Assad 1970-2021, (Seuil, 2022). Elle est l'auteure, entre autres, de L'art contre l'art (Méthodes; 2006), Rwanda Le réel et les récits (Belin, 2004), L'enfant et le génocice. Témoignages sur l'enfance pendant la Shoah, Bouquins-Laffont, 2007, avec A. Kalisky), La littérature en suspens. Le témoignage et les oeuvres. (L'Arachnéen, 2015), Le mal de vérité ou l'utopie de la mémoire (Colin, 2015) et du recueil d'essais A quoi bon encore le monde? La Syrie et nous (Actes Sud 2022). 

D.R.

Najah Albukai est né en 1970 à Homs en Syrie. Diplômé des beaux-arts de Damas, il poursuit ses études en France à l'école des beaux arts de Rouen. De retour en Syrie, il s'oppose au régime d'Alassad et éprouve dans sa chair la répression et l'emprisonnement réservés aux dissidents.

C'est en 2016 qu'il obtient le statut de réfugié politique et s'installe en région parisienne. Son œuvre puissante, ses dessins d'eaux fortes et d'encres lumineuses témoignent des multiples situations auxquelles il a été confrontées. Ces scènes qu'il a gravées au nom de sa foi en l'Homme, de ses compagnons de souffrances et de dignité, de son amour inouï pour la liberté.

D.R.

Joël Hubrecht est responsable scientifique et de programme à l’Institut des Études et de la recherche sur le droit et la justice (IERDJ), membre du comité de rédaction d’Esprit et du Comité Syrie-Europe après Alep, spécialiste de la justice pénale internationale et des justices transitionnelles. Il a co-dirigé l’ouvrage : Syrie, le pays brûlé. Le livre noir des Assad (Le Seuil, 2022).

Madjid Zerrouky est journaliste au service international au Monde depuis 2016 au « desk Moyen-Orient ». Il couvre essentiellement l'Iran, la Syrie, le Yémen après avoir travaillé plusieurs années sur les mouvements djihadistes ; parfois le Maghreb, essentiellement l'Algérie.