Rencontre avec Jocelyne Dakhlia et Étienne de la Vaissière
Présentation d'ouvrages retenus dans la sélection du Grand Prix du livre d'Histoire de l'institut du monde arabe
- Étienne de la Vaissière, Asie centrale 300-850. Des routes et des royaumes (Les Belles lettres, 2024)
L’Asie centrale forme le cœur des échanges eurasiatiques médiévaux, ce que l’on appelle, pas totalement à tort, la « route de la soie ». Caravanes et conquérants, moines et artistes, tous passent par Samarcande, Dunhuang ou Bactres, pour aller de la Chine à Byzance ou de l’Iran et l’Inde à la steppe. C’est l’époque de la première globalisation, mille ans avant l’expansion européenne. Mais cette histoire est en lambeaux, et, à l’apogée de ces contacts, de la chevauchée des Huns au quatrième siècle de notre ère à la fin de l’empire tibétain et à l’islamisation au IXe siècle, jamais aucun ouvrage, dans quelque langue que ce soit, n’avait tenté d’en suivre tous les fils et d’en retisser patiemment les motifs.
- Jocelyne Dakhlia, Harems et Sultans. Genre et despotisme au Maroc et ailleurs, XIVe-XXe siècle (Anacharsis, 2024)
Sitôt prononcé le mot « harem », surgissent des images de femmes lascives, cloîtrées dans la pénombre en attente du bon vouloir du prince. C’est aussi l’expression exemplaire du gouvernement de sultans réputés exercer leur pouvoir sous l’emprise de pulsions quasi pathologiques. Ces poncifs, que l’on pourrait croire éculés, entrent aujourd’hui encore en résonance avec la conception d’un monde islamique figé et politiquement inepte, fatalement voué au despotisme et à l’oppression des femmes.
Modération : Françoise Briquel-Chatonnet, directrice de recherche au CNRS