Laurent Bonelli et Fabien Carrié viennent de faire paraître au Seuil « La Fabrique de la radicalité. Une sociologie des jeunes djihadistes français », l’enquête la plus fouillée à ce jour sur le sujet. Débat avec les deux auteurs.
L’inquiétude produite par les attentats récents et par le départ de centaines de jeunes vers la Syrie a suscité un déferlement d’analyses, dont le caractère foisonnant masque l’absence quasi complète de données à grande échelle sur ceux qui épousent la cause djihadiste.
Une lacune que vient combler La Fabrique de la radicalité. Fondée sur l’étude systématique de 133 dossiers judiciaires de mineurs poursuivis pour des affaires de terrorisme ou signalés pour « radicalisation », elle permet d’appréhender la manière dont les situations familiales, les relations avec les institutions, les cursus scolaires ou la socialisation entre pairs façonnent les appropriations de l’idéologie djihadiste.
L’enquête révèle ainsi des types de radicalité différents, de la rébellion contre les familles ou les institutions à un engagement pour faire advenir une nouvelle utopie politique et religieuse. À rebours des clichés sur les « délinquants terroristes », cet engagement peut aussi concerner des jeunes issus de familles stables, doués à l’école et sans passé judiciaire. De façon troublante, c’est aussi le rôle que les réponses institutionnelles peuvent parfois jouer dans les passages à l’acte que ce travail capital met au jour.
Avec Laurent Bonelli, maître de conférences en science politique de l’université de Paris-Nanterre et Fabien Carrié, docteur en science politique de l’université de Paris-Nanterre, tous deux membres de l’Institut des sciences sociales du politique (UMR 7220).
Débat animé par Sonya Faure, Journaliste pages Idées à Libération.