Amateurs de raï, inscrivez-vous vite à l'Université ! Et venez suivre les 5 « leçons » de Hadj Sameer qui, à travers séances d’écoute, rencontres, concerts, images, vous fera naviguer dans le temps d’un mouvement musical protéiforme et sans cesse renouvelé. La première séance de cette Université inédite est dédiée aux 60s, des chants folkloriques oranais au proto-raï. L’ère des cheikhates et des cheikhs, poétesses et poètes de rue algériens…
En partenariat avec Arte et Zed Production
Dans le cadre d’un partenariat avec Arte et Zed Production, et de la websérie Raï is no dead consacrée à l’histoire du raï, produite et diffusée par ARTE fin 2022, l’IMA a invité Hadj Sameer à concevoir une « Université du Raï » en cinq leçons. A travers séances d’écoute, rencontres, concerts, images, cette Université nous fera naviguer dans le temps – passé, présent et futur –, d’un mouvement musical protéiforme sans cesse renouvelé. L'Université du raï se concluera par la projection en avant-première, le 10 décembre, des 5 épisodes de la série, suivie d'une soirée électro-raï.
- Protagoniste principal du documentaire, il part à la recherche de témoignages et de curiosités sonores
« Ya Rayi » (mon sort, mon destin), ces mots chantonnés avec fatalisme par les chanteurs ambulants dans les rues d’Oran sur des rythmes bédouins (gasba, bendir, guellal, respectivement, flûte en roseau, large tambourin, et percussion longue) avaient un phrasé bien à eux, originaire des campagnes. Ces troubadours algériens improvisateurs avaient pour habitude de chanter et narrer des scènes du quotidien, nourries de clichés et d’interdits (amours, passions, tabous). En rupture avec les codes de la musique communément écoutée à l’époque, ils ont d’ores et déjà une dimension subversive. Cet art des rues bédouin s’accompagne le plus souvent de danses et d’une scénographie bien à lui, menées par des cheikhs ou cheikhates qui se produisent dans des débits de boisson oranais, tenus majoritairement par des juifs algériens. Une nouvelle scène musicale émerge, et de nombreux chouikh (pluriel de cheikh) se sédentarisent.
Parallèlement apparaissent les Medahates, des femmes au parlé sulfureux. Ces griottes algériennes oranaises, souvent veuves, célibataires, divorcées, dont les paroles hypnotiques sont une ode à la sensualité, et dont les chants résonnent dans des rassemblements exclusivement féminins, lors de cérémonies de circoncisions ou de mariages, connaissent un grand succès. Nombre de jeunes garçons les écoutent aux portes ou grimpent aux murs pour assister clandestinement à leurs spectacles mystiques. Leur figure de proue, Cheikha Remitti, devient une vedette dès 1954, à l'âge de 31 ans.
Leurs inspirations traditionnelles s’additionnent à des chants oranais plus classiques (Ahmed Wahby ou Blaoui Houari) inspirés des orchestres arabes, du Moyen-Orient et notamment de l’Égypte, et vont largement influencer la jeunesse oranaise des années 50 et 60, dont Bouteldja Belkacem. En 1966, tout jeune, celui-ci sort un 45 tours avec le titre « Ya Rai » en face B, un morceau qu'il chante en s’inspirant fortement des styles avec lesquels il a grandi, mais en y apportant une fougue toute particulière avec sa voix de jeune garçon. Ainsi commence, à Oran, à émerger un nouveau style, digne héritier des chants folkloriques bédouins oranais d’un côté, et plus classiquement arabo-nationalistes de l’autre : le raï dans sa forme la plus brute.
Le raï apparaît donc en Oranie, région d'Algérie au carrefour migratoire de populations, berbères, arabes, andalouses, judéo-berbères, subsahariennes, etc. Une terre propice à son éclosion, qui a permis à des sonorités, des instruments, des langues et des musiciens de s’entremêler puis de fusionner. Puisant à ce riche paysage sonore, il résonnera bien au-delà de sa région d'origine. Empruntant régulièrement à son patrimoine traditionnel, il y apporte une touche de modernité souvent transgressive, dans ses paroles et son identité. Il mute perpétuellement, tout comme la société qu’il incarne, jusqu’à traverser la Méditerranée dans les années 80 et y trouver une nouvelle résonnance chez un peuple algérien travailleur, en exil, installé en France mais tristement déraciné.
Vecteur presque universel d’émotions, il s’adaptera très facilement à d’autres genres musicaux (rock, reggae, afrobeat, hip hop, musique électronique...) faisant ainsi son succès à l’international jusque dans les années 2000. En dépit d’une disparition des principaux canaux de diffusion (chaînes de télévisions, radios grand public, presses), le raï existe encore, renaissant continûment auprès des plus jeunes, et fait toujours autant vibrer.
Hadj Sameer, 31 ans, collectionneur de vinyles et cassettes et patron de label d’origine algérienne, sillonne la planète depuis une quinzaine d'années. Il a constitué une solide collection de raretés sonores provenant du monde entier. Le raï, partie « viscéralement » intégrante de son patrimoine musical, fait écho à ses souvenirs de fêtes familiales, en France comme en Algérie.
Après avoir perdu son père, Hadj Omar, début 2022, il décide de lui rendre hommage en travaillant avec Arte à l’élaboration d’un documentaire retraçant l’histoire du raï, de sa genèse à aujourd'hui. Protagoniste principal du documentaire, il y part à la recherche de témoignages et de curiosités sonores ayant marqué cette histoire, et en raconte les temps forts à travers ses recherches, ses trouvailles et sa collection, qu’il partage en exclusivité aujourd’hui avec le public de l’Institut du monde arabe.
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